Aller au contenu

Page:Hugo - Légende des siècles, Hachette, 1920, 1e série, volume 1.djvu/369

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

C’est le squelette ayant faim et soif dans la tombe. Dans ce siècle où sur tous l’esclavage surplombe, Où tout être, perdu dans la nuit, quel qu’il soit, Même le plus petit, même le plus étroit, Offre toujours assez de place pour un maître, Où c’est un tort de vivre, où c’est un crime d’être, Ce pauvre homme est chétif au point qu’il est absous ; Il habite le coin du néant, au-dessous Du dernier échelon de la souffrance humaine, Si bas, que les heureux ne prennent pas la peine D’ajouter sa misère à leur joyeux orgueil, Ni les infortunés d’y confronter leur deuil ; Penché sur le tombeau plein de l’ombre mortelle, Il est comme un cheval attendant qu’on dételle ; Abject au point que l’homme et la femme, les pas, Les bruits, l’enterrement, la noce, les trépas, Les fêtes, sans l’atteindre, autour de lui s’écoulent ; Et le bien et le mal, sans le voir, sur lui roulent ; Tout au plus raille-t-on ce gueux sur son fumier ;