Page:Hugo - Légende des siècles, Hachette, 1920, 1e série, volume 2.djvu/77

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Criaient, montrant leurs fers, leur sang, leurs maux, leurs plaies :

« C’est Mourad ! c’est Mourad ! justice, ô dieu vivant ! »

À ce cri, qu’apportait de toutes parts le vent,
Les tonnerres jetaient des grondements étranges,
Des flamboiements passaient sur les faces des anges,
Les grilles de l’enfer s’empourpraient, le courroux
En faisait remuer d’eux-mêmes les verrous,
Et l’on voyait sortir de l’abîme insondable
Une sinistre main qui s’ouvrait formidable ;
« Justice ! » répétait l’ombre ; et le châtiment
Au fond de l’infini se dressait lentement.

Soudain, du plus profond des nuits, sur la nuée,
Une bête difforme, affreuse, exténuée,
Un être abject et sombre, un pourceau, s’éleva,
Ouvrant un œil sanglant qui cherchait Jéhovah ;
La nuée apporta le porc dans la lumière,
À l’endroit même où luit l’unique sanctuaire,