Page:Hugo - La Fin de Satan, 1886.djvu/72

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

e ;
Il habilla d’acier ses soldats triomphants ;
Il fit trembler des tours au dos des éléphants ;
Il troua le Caucase ébranlé sur son axe ;
Il versa dans la mer le Cyrus et l’Araxe ;
Mais rien n’emplit son âme ; il disait : J’ai vécu.
Que faire ? et, chaque jour, plus las et plus vaincu,
Morne, il sentait monter dans son cœur solitaire
L’immense ennui d’avoir conquis toute la terre.


II

L’an deux mille, Nemrod, passant les flots émus,
Vint jusqu’à Dodanim que nous nommons l’Hémus.
Là, dans un noir désert dont le lion est l’hôte,
Il entendit quelqu’un qui parlait à voix haute.
C’était Orphée. Orphée au front calme, écouté
Par la sombre nature émue à sa clarté,
Homme à qui se frottait le dos des bêtes fauves,
Racontait aux forêts, aux vents, aux vieux monts chauves,
La bataille où les dieux vainquirent les typhons.
Voici ce que disait Orphée aux bois profonds :