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LE PETIT ROI DE GALICE.

On pouvait voir encor, sous la nuit étoilée,
Le groupe formidable au fond de la vallée.
Le combat finissait ; tous ces monts radieux
Ou lugubres, jadis hantés des demi-dieux,
S’éveillaient, étonnés, dans le blanc crépuscule,
Et, regardant Roland, se souvenaient d’Hercule.
Plus d’infants : neuf étaient tombés ; un avait fui ;
C’était Ruy le Subtil ; mais la bande sans lui
Avait continué, car rien n’irrite comme
La honte et la fureur de combattre un seul homme ;
Durandal, à tuer ces coquins s’ébréchant,
Avait jonché de morts la terre, et fait ce champ
Plus vermeil qu’un nuage où le soleil se couche ;
Elle s’était rompue en ce labeur farouche ;
Ce qui n’empêchait pas Roland de s’avancer ;
Les bandits, le croyant prêt à recommencer,
Tremblants comme des bœufs qu’on ramène à l’étable
À chaque mouvement de son bras redoutable,
Reculaient, lui montrant de loin leurs coutelas ;
Et, pas à pas, Roland, sanglant, terrible, las,
Les chassait devant lui parmi les fondrières ;
Et, n’ayant plus d’épée, il leur jetait des pierres.