Page:Hugo - La Légende des siècles, 1e série, édition Hetzel, 1859, tome 2.djvu/112

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Sur ses flancs palpitaient des prés et des campagnes,
Et ses difformités s’étaient faites montagnes ;
Les animaux qu’avaient attirés ses accords,
Daims et tigres, montaient tout le long de son corps ;
Des avrils tout en fleurs verdoyaient sur ses membres ;
Le pli de son aisselle abritait des décembres ;
Et des peuples errants demandaient leur chemin,
Perdus au carrefour des cinq doigts de sa main ;
Des aigles tournoyaient dans sa bouche béante ;
La lyre, devenue en le touchant géante,
Chantait, pleurait, grondait, tonnait, jetait des cris ;
Les ouragans étaient dans les sept cordes pris
Comme des moucherons dans de lugubres toiles ;
Sa poitrine terrible était pleine d’étoiles.

Il cria :

« L’avenir, tel que les cieux le font,
» C’est l’élargissement dans l’infini sans fond,
» C’est l’esprit pénétrant de toutes parts la chose !
» On mutile l’effet en limitant la cause ;
» Monde, tout le mal vient de la forme des dieux.
» On fait du ténébreux avec le radieux ;
» Pourquoi mettre au-dessus de l’Être, des fantômes ?
» Les clartés, les éthers ne sont pas des royaumes.