Page:Hugo - La Légende des siècles, 1e série, édition Hetzel, 1859, tome 2.djvu/170

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Tant que les nations garderont leurs frontières,
La Suisse éclatera parmi les plus altières ;
Quand les peuples riront et s’embrasseront tous,
La Suisse sera douce au milieu des plus doux.

Suisse ! à l’heure où l’Europe enfin marchera seule,
Tu verras accourir vers toi, sévère aïeule,
La jeune Humanité sous son chapeau de fleurs ;
Tes hommes bons seront chers aux hommes meilleurs ;
Les fléaux disparus, faux dieu, faux roi, faux prêtre,
Laisseront le front blanc de la paix apparaître ;
Et les peuples viendront en foule te bénir,
Quand la guerre mourra, quand, devant l’avenir,
On verra, dans l’horreur des tourbillons funèbres,
Se hâter pêle-mêle au milieu des ténèbres,
Comme d’affreux oiseaux heurtant leurs ailerons,
Une fuite effrénée et noire de clairons !

En attendant, la Suisse a dit au monde : Espère !
Elle a de la vieille hydre effrayé le repaire ;
Ce qu’elle a fait jadis, pour les siècles est fait ;
La façon dont la Suisse à Sempach triomphait