Page:Hugo - La Légende des siècles, 1e série, édition Hetzel, 1859, tome 2.djvu/48

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Celui qui fait le choix se trompe ; il serait mieux
Que l’enfant eût la mère et la tombe le vieux.
Mais de la mère au moins il sied qu’on se souvienne ;
Et, puisqu’elle a ma place, hélas ! je prends la sienne.

Vois donc le beau soleil et les fleurs dans les prés !
C’est par un jour pareil, les Grecs étant rentrés
Dans Smyrne, le plus grand de leurs ports maritimes,
Que, le bailli de Rhode et moi, nous les battîmes.
Mais regarde-moi donc tous ces beaux jouets-là !
Vois ce reître, on dirait un archer d’Attila.
Mais c’est qu’il est vêtu de soie et non de serge !
Et le chapeau d’argent de cette sainte Vierge !
Et ce bonhomme en or ! Ce n’est pas très-hideux.
Mais comme nous allons jouer demain tous deux !
Si ta mère était là, qu’elle serait contente !
Ah ! quand on est enfant, ce qui plaît, ce qui tente,
C’est un hochet qui sonne un moment dans la main,
Peu de chose le soir et rien le lendemain ;
Plus tard, on a le goût des soldats véritables,
Des palefrois battant du pied dans les étables,
Des drapeaux, des buccins jetant de longs éclats,
Des camps, et c’est toujours la même chose, hélas !
Sinon qu’alors on a du sang à ses chimères.
Tout est vain. C’est égal, je plains les pauvres mères