Page:Hugo - La Légende des siècles, 2e série, édition Hetzel, 1877, tome 1.djvu/66

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L’inceste souriant, ivre, au sinistre hymen,
Le parricide ayant le tonnerre à la main,
Pluton livide avec l’enfer pour auréole,
L’immense fou Neptune en proie au vague Éole,
L’orageux Jupiter, Diane à l’œil peu sûr,
Des fronts de météore entrevus dans l’azur,
Habitent ce sommet ; et tout ce que l’augure,
Le flamine, imagine, invente, se figure,
Et vénère à Corinthe, à Syène, à Paphos,
Tout le vrai des autels qui dans la tombe est faux,
L’oppression, la soif du sang, l’âpre carnage,
L’impudeur qui survit à la guerre et surnage,
L’extermination des enfants de Japhet,
Toute la quantité de crime et de forfait
Que de noms révérés la religion nomme,
Et que peut dans la nuit d’un temple adorer l’homme,
Sur ce faîte fatal que l’aube éclaire en vain,
Rayonne, et tout le mal possible est là, divin.

Jadis la terre était heureuse ; elle était libre.
Et, donnant l’équité pour base à l’équilibre,
Elle avait ses grands fils, les géants ; ses petits,
Les hommes ; et tremblants, cachés, honteux, blottis
Dans les antres, n’osant nuire à la créature,
Les fléaux avaient peur de la sainte nature ;
L’étang était sans peste et la mer sans autans ;
Tout était beauté, fête, amour, blancheur, printemps ;