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LA PITIÉ SUPRÊME.

Mais non pas dans l’histoire où le sang reparaît,
N’avoir pas d’Isaïe acharné sur son ombre,
Être du moins l’objet d’un peu de pitié sombre,
S’appeler le bandit et non pas le tyran !

Quoi ! le cafre qui teint ses lèvres de safran,
Le huron manœuvrant sa pirogue d’écorce,
Vole, vous l’absolvez, penseurs ! Le brigand corse,
Fauve et traitant le droit comme un pays conquis,
Silhouette sinistre, erre dans les makis,
Vous murmurez : pardon ! Nul n’exige qu’un nègre
Ou qu’un malgache, étant stupide, soit intègre ;
On les plaint ; savent-ils ce que c’est que la loi ?
Et vous ne plaignez pas ce sultan ou ce roi,
Cet autre nègre orné d’autres verroteries !
Le zingaro qui vit en dehors des patries
Vous émeut ; le mougick à Cronstadt, le hammal
Au Fanar, vous plaidez pour eux s’ils font le mal ;
Le loup suit son instinct en ravageant l’étable.
Quoi ! vous allez chercher sur son banc lamentable