Page:Hugo - Les Châtiments (Hetzel, 1880).djvu/335

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Des enfants sont forçats en Afrique ; c’est bien.
Si vous pleurez, tenez votre larme secrète.
Le bourreau, noir faucheur, debout dans sa charrette
Revient de la moisson avec son panier plein ;
Pas un souffle. Il est là, ce Tibère-Ezzelin
Qui se croit scorpion et n’est que scolopendre,
Fusillant, et jaloux de Haynau qui peut pendre ;
Eclaboussé de sang, le prêtre l’applaudit ;
Il est là, ce César chauve-souris qui dit
Aux rois : voyez mon sceptre ; aux gueux : voyez mon crime ;
Ce vainqueur qui, béni, lavé, sacré, sublime,
De deux pourpres vêtu, dans l’histoire s’assied,
Le globe dans sa main, un boulet à son pied ;
Il nous crache au visage, il règne ! nul ne bouge.

Et c’est à votre front qu’on voit monter le rouge,
C’est vous qui vous levez et qui vous indignez,
Femmes ; le sein gonflé, les yeux de pleurs baignés,
Vous huez le tyran, vous consolez les tombes.
Et le vautour frémit sous le bec des colombes !

Et moi, proscrit pensif, je vous dis : Gloire à vous !
Oh ! oui, vous êtes bien le sexe fier et doux,
Ardent au dévouement, ardent à la souffrance,
Toujours prêt à la lutte, à Béthulie, en France,
Dont l’âme à la hauteur des héros s’élargit,
D’où se lève Judith, d’où Charlotte surgit !
Vous mêlez la bravoure à la mélancolie.
Vous êtes Porcia, vous êtes Cornélie,
Vous êtes Arria qui saigne et qui sourit ;