Page:Hugo - Les Misérables Tome III (1890).djvu/179

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du pétillement, de l’éclair, la parade juste, et des ripostes mathématiques, bigre ! et il est gaucher.

Dans l’angle opposé à Grantaire, Joly et Bahorel jouaient aux dominos et parlaient d’amour.

— Tu es heureux, toi, disait Joly. Tu as une maîtresse qui rit toujours.

— C’est une faute qu’elle fait, répondait Bahorel. La maîtresse qu’on a a tort de rire. Ça encourage à la tromper. La voir gaie, cela vous ôte le remords ; si on la voit triste, on se fait conscience.

— Ingrat ! c’est si bon une femme qui rit ! Et jamais vous ne vous querellez !

— Cela tient au traité que nous avons fait. En faisant notre petite sainte-alliance, nous nous sommes assigné à chacun notre frontière que nous ne dépassons jamais. Ce qui est situé du côté de bise appartient à Vaud, du côté de vent à Gex. De là la paix.

— La paix, c’est le bonheur digérant.

— Et toi, Jolllly, où en es-tu avec ta brouillerie avec mamselle… tu sais qui je veux dire ?

— Elle me boude avec une patience cruelle.

— Tu es pourtant un amoureux attendrissant de maigreur.

— Hélas !

— À ta place, je la planterais là.

— C’est facile à dire.

— Et à faire. N’est-ce pas Musichetta qu’elle s’appelle ?

— Oui. Ah ! mon pauvre Bahorel, c’est une fille superbe, très littéraire, de petits pieds, de petites mains, se mettant