gent. Ils sont tous les mêmes ! À propos, comment la lettre à cette vieille ganache était-elle signée ?
— Fabantou, répondit la fille.
— L’artiste dramatique, bon.
Bien en prit à Jondrette, car en ce moment-là même M. Leblanc se retournait vers lui, et lui disait de cet air de quelqu’un qui cherche le nom :
— Je vois que vous êtes bien à plaindre, monsieur…
— Fabantou, répondit vivement Jondrette.
— Monsieur Fabantou, oui, c’est cela, je me rappelle.
— Artiste dramatique, monsieur, et qui a eu des succès.
Ici Jondrette crut évidemment le moment venu de s’emparer du « philanthrope ». Il s’écria avec un son de voix qui tenait tout à la fois de la gloriole du bateleur dans les foires et de l’humilité du mendiant sur les grandes routes :
— Élève de Talma, monsieur ! je suis élève de Talma ! La fortune m’a souri jadis. Hélas ! maintenant c’est le tour du malheur. Voyez, mon bienfaiteur, pas de pain, pas de feu. Mes pauvres mômes n’ont pas de feu ! Mon unique chaise dépaillée ! Un carreau cassé ! par le temps qu’il fait ! Mon épouse au lit ! malade !
— Pauvre femme ! dit M. Leblanc.
— Mon enfant blessée ! ajouta Jondrette.
L’enfant, distraite par l’arrivée des étrangers, s’était mise à contempler « la demoiselle », et avait cessé de sangloter.
— Pleure donc ! braille donc ! lui dit Jondrette bas.
En même temps il lui pinça sa main malade. Tout cela avec un talent d’escamoteur.