Page:Hugo - Les Misérables Tome II (1890).djvu/328

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et force de chiens. Ces dispositions combinées, sentant Jean Valjean saisi entre l’impasse Genrot à droite, son agent à gauche, et lui Javert derrière, il prit une prise de tabac.

Puis il se mit à jouer. Il eut un moment ravissant et infernal ; il laissa aller son homme devant lui, sachant qu’il le tenait, mais désirant reculer le plus possible le moment de l’arrêter, heureux de le sentir pris et de le voir libre, le couvant du regard avec cette volupté de l’araignée qui laisse voleter la mouche et du chat qui laisse courir la souris. La griffe et la serre ont une sensualité monstrueuse ; c’est le mouvement obscur de la bête emprisonnée dans leur tenaille. Quel délice que cet étouffement !

Javert jouissait. Les mailles de son filet étaient solidement attachées. Il était sûr du succès ; il n’avait plus maintenant qu’à fermer la main.

Accompagné comme il l’était, l’idée même de la résistance était impossible, si énergique, si vigoureux, et si désespéré que fût Jean Valjean.

Javert avança lentement, sondant et fouillant sur son passage tous les recoins de la rue comme les poches d’un voleur.

Quand il arriva au centre de sa toile, il n’y trouva plus la mouche.

On imagine son exaspération.

Il interrogea sa vedette des rues Droit-Mur et Picpus ; cet agent, resté imperturbable à son poste, n’avait point vu passer l’homme.

Il arrive quelquefois qu’un cerf est brisé la tête cou-