Page:Hugo - Les Misérables Tome IV (1890).djvu/231

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Du reste il ne leur fit pas de questions. Être sans domicile, quoi de plus simple ?

L’aîné des deux mômes, presque entièrement revenu à la prompte insouciance de l’enfance, fit cette exclamation :

— C’est drôle tout de même. Maman qui avait dit qu’elle nous mènerait chercher du buis bénit le dimanche des rameaux.

— Neurs, répondit Gavroche.

— Maman, reprit l’aîné, est une dame qui demeure avec mamselle Miss.

— Tanflûte, repartit Gavroche.

Cependant il s’était arrêté, et depuis quelques minutes il tâtait et fouillait toutes sortes de recoins qu’il avait dans ses haillons.

Enfin il releva la tête d’un air qui ne voulait qu’être satisfait, mais qui était en réalité triomphant.

— Calmons-nous, les momignards. Voici de quoi souper pour trois.

Et il tira d’une de ses poches un sou.

Sans laisser aux deux petits le temps de s’ébahir, il les poussa tous deux devant lui dans la boutique du boulanger, et mit son sou sur le comptoir en criant :

— Garçon ! cinque centimes de pain.

Le boulanger, qui était le maître en personne, prit un pain et un couteau.

— En trois morceaux, garçon ! reprit Gavroche, et il ajouta avec dignité :

— Nous sommes trois.