Page:Hugo - Les Misérables Tome IV (1890).djvu/26

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Blaye, Deutz acheté, Pritchard payé, sont le fait du règne ; la politique plus familiale que nationale est le fait du roi.

Comme on voit, le décompte opéré, la charge du roi s’amoindrit.

Sa grande faute, la voici : il a été modeste au nom de la France.

D’où vient cette faute ?

Disons-le.

Louis-Philippe a été un roi trop père ; cette incubation d’une famille qu’on veut faire éclore dynastie a peur de tout et n’entend pas être dérangée ; de là des timidités excessives, importunes au peuple qui a le 14 juillet dans sa tradition civile et Austerlitz dans sa tradition militaire.

Du reste, si l’on fait abstraction des devoirs publics, qui veulent être remplis les premiers, cette profonde tendresse de Louis-Philippe pour sa famille, la famille la méritait. Ce groupe domestique était admirable. Les vertus y coudoyaient les talents. Une des filles de Louis-Philippe, Marie d’Orléans, mettait le nom de sa race parmi les artistes comme Charles d’Orléans l’avait mis parmi les poëtes. Elle avait fait de son âme un marbre qu’elle avait nommé Jeanne d’Arc. Deux des fils de Louis-Philippe avaient arraché à Metternich cet éloge démagogique : Ce sont des jeunes gens comme on n’en voit guère et des princes comme on n’en voit pas.

Voilà, sans rien dissimuler, mais aussi sans rien aggraver, le vrai sur Louis-Philippe.

Être le prince égalité, porter en soi la contradiction de la restauration et de la révolution, avoir ce côté inquiétant du révolutionnaire qui devient rassurant dans le gouvernant,