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II

MARIUS



Marius était parti désolé de chez M. Gillenormand. Il y était entré avec une espérance bien petite ; il en sortait avec un désespoir immense.

Du reste, et ceux qui ont observé les commencements du cœur humain le comprendront, le lancier, l’officier, le dadais, le cousin Théodule, n’avait laissé aucune ombre dans son esprit. Pas la moindre. Le poëte dramatique pourrait en apparence espérer quelques complications de cette révélation faite à brûle-pourpoint au petit-fils par le grand-père. Mais ce que le drame y gagnerait, la vérité le perdrait. Marius était dans l’âge où, en fait de mal, on ne croit rien ; plus tard vient l’âge où l’on croit tout. Les soupçons ne sont autre chose que des rides. La première jeunesse n’en a pas. Ce qui bouleverse Othello, glisse sur Candide. Soupçonner Cosette ! il y a une foule de crimes que Marius eût faits plus aisément.

Il se mit à marcher dans les rues, ressource de ceux qui