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Page:Hugo - Les Misérables Tome I (1890).djvu/480

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472 Les Misérables. ― Fantine.  

billard qui était au rez-de-chaussée, s’y assit, et s’accouda sur une table. Il avait mis quatorze heures à ce trajet qu’il comptait faire en six. Il se rendait la justice que ce n’était pas sa faute ; mais au fond il n’en était pas fâché.

La maîtresse de l’hôtel entra.

— Monsieur couche-t-il ? monsieur soupe-t-il ?

Il fit un signe de tête négatif.

— Le garçon d’écurie dit que le cheval de monsieur est bien fatigué !

Ici il rompit le silence.

— Est-ce que le cheval ne pourra pas repartir demain matin ?

— Oh ! monsieur ! il lui faut au moins deux jours de repos.

Il demanda :

— N’est-ce pas ici le bureau de poste ?

— Oui, monsieur.

L’hôtesse le mena à ce bureau ; il montra son passe-port et s’informa s’il y avait moyen de revenir cette nuit même à Montreuil-sur-mer par la malle ; la place à côté du courrier était justement vacante ; il la retint et la paya. — Monsieur, dit le buraliste, ne manquez pas d’être ici pour partir à une heure précise du matin.

Cela fait, il sortit de l’hôtel et se mit à marcher dans la ville.

Il ne connaissait pas Arras, les rues étaient obscures, et il allait au hasard. Cependant il semblait s’obstiner à ne pas demander son chemin aux passants. Il traversa la petite rivière Crinchon et se trouva dans un dédale de ruelles