Page:Hugo - Les Travailleurs de la mer Tome I (1891).djvu/211

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
209
DURANDE ET DÉRUCHETTE

était plutôt tenace que logique. Mais, sous cette pression, sa ténacité même fléchissait. Il mettait, autre locution pleine de concessions latentes, et parfois inavouables, « de l’eau dans son vin ». Il se tenait à l’écart des hommes du clergé, mais il ne leur fermait point résolûment sa porte. Aux occasions officielles et aux époques voulues des visites pastorales, il recevait d’une façon suffisante, soit le recteur luthérien, soit le chapelain papiste. Il lui arrivait, de loin en loin, d’accompagner à la paroisse anglicane Déruchette, laquelle elle-même, nous l’avons dit, n’y allait qu’aux quatre grandes fêtes de l’année.

Somme toute, ces compromis, qui lui coûtaient, l’irritaient, et, loin de l’incliner vers les gens d’église, augmentaient son escarpement intérieur. Il s’en dédommageait par plus de moquerie. Cet être sans amertume n’avait d’âcreté que de ce côté-là. Aucun moyen de l’amender là-dessus.

De fait et absolument, c’était son tempérament, et il fallait en prendre son parti.

Tout clergé lui déplaisait. Il avait l’irrévérence révolutionnaire. D’une forme à l’autre du culte il distinguait peu. Il ne rendait même pas justice à ce grand progrès : ne point croire à la présence réelle. Sa myopie en ces choses allait jusqu’à ne point voir la nuance entre un ministre et un abbé. Il confondait un révérend docteur avec un révérend père. Il disait : Wesley ne vaut pas mieux que Loyola. Quand il voyait passer un pasteur avec sa femme, il se détournait. Prêtre marié ! disait-il, avec l’accent absurde que ces deux mots avaient en France à cette époque. Il contait qu’à son dernier voyage en Angleterre, il avait vu « l’évêchesse de