Page:Hugo - Les Travailleurs de la mer Tome I (1891).djvu/25

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D’autres cabanes ont été des barques ; une coque de bateau renversée, et juchée sur des pieux et des traverses, cela fait un toit, Une nef, la cale en haut, c’est une église ; la voûte en bas, c’est un navire ; le récipient de la prière retourné, dompte la mer.

Dans les paroisses arides de l’ouest, le puits banal, avec son petit dôme de maçonnerie blanche au milieu des friches, imite presque le marabout arabe. Une solive trouée avec une pierre pour pivot ferme la haie d’un champ ; on reconnaît à de certaines marques les échaliers sur lesquels les lutins et les auxcriniers se mettent à cheval la nuit.

Les ravins étalent pêle-mêle sur leurs talus les fougères ; les liserons, les roses de loup, les houx aux graines écarlates, l’épine blanche, l’épine rose, l’hièble d’Écosse, le troëne, et ces longues lanières plissées, dites collerettes de Henri IV. Dans toute cette herbe pullule et prospère un épilobe à gousses, fort brouté des bourriques ; ce que la botanique exprime avec élégance et pudeur par le mot onagrariée. Partout des fourrés, des charmilles, « toutes sortes de brehailles » ; des épaisseurs vertes où ramage un monde ailé, guetté par un monde rampant ; merles, linottes, rouges-gorges, geais, torquilles ; le loriot des Ardennes se hâte à tire-d’aile ; des volées d’étourneaux manœuvrent en spirale ; ailleurs le verdier, le chardonneret, la cauvette picarde, la corneille aux pieds rouges. Çà et là une couleuvre.

De petites chutes d’eau, amenées dans des encaissements de bois vermoulu qui laissent échapper des gouttes, font tourner des moulins dont on entend le battement sous les branchages. Quelques cours de fermes ont encore à leur