Page:Hugo - Les Travailleurs de la mer Tome I (1891).djvu/325

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
319
LE REVOLVER

térébenthine, il a fait eau, et en faisant jouer les pompes il a pompé avec l’eau tout son chargement. Quant au trois-mâts, il a surtout souffert dans les hauts ; la guibre, la poulaine, les minots, le jas de l’ancre à bâbord, tout ça cassé. Le bout-dehors du grand foc cassé au ras du chouque. Les haubans de focs et les sous-barbes, va-t’en voir s’ils viennent. Le mât de misaine n’a rien ; il a eu cependant une sévère secousse. Tout le fer du beaupré a manqué, et, chose incroyable, le beaupré n’est que mâché, mais il est complètement dépouillé. Le masque du navire à bâbord est à jour trois bons pieds carrés. Voilà ce que c’est que de ne pas écouter le monde.

Clubin avait posé sa chandelle sur la table et s’était mis à repiquer un rang d’épingles qu’il avait dans le collet de sa vareuse. Il reprit :

— Ne disiez-vous pas, capitaine Gertrais, que le Tamaulipas ne relâchera point ?

— Non. Il va droit au Chili.

— En ce cas il ne pourra pas donner de ses nouvelles en route.

— Pardon, capitaine Clubin. D’abord il peut remettre des dépêches à tous les bâtiments qu’il rencontre faisant voile pour Europe.

— C’est juste.

— Ensuite il a la boîte aux lettres de la mer.

— Qu’appelez-vous la boîte aux lettres de la mer ?

— Vous ne connaissez pas ça, capitaine Clubin ?

— Non.

— Quand on passe le détroit de Magellan.

— Eh bien ?