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LES TRAVAILLEURS DE LA MER

Le point de France le plus proche du Rocher Douvres est le cap Bréhant. Le rocher Douvres est un peu plus loin de la côte de France que de la première île de l’archipel normand. La distance de cet écueil à Jersey se mesure à peu près par la grande diagonale de Jersey. Si l’île de Jersey tournait sur la Corbière comme sur un gond, la pointe Sainte-Catherine irait presque frapper les Douvres. C’est encore là un éloignement de plus de quatre lieues.

Dans ces mers de la civilisation les roches les plus sauvages sont rarement désertes. On rencontre des contrebandiers à Hagot, des douaniers à Binic, des celtes à Bréhat, des cultivateurs d’huîtres à Cancale, des chasseurs de lapins à Césambre, l’île de César, des ramasseurs de crabes à Brecq-Hou, des pêcheurs au chalut aux Minquiers, des pêcheurs à la trouble à Écré-Hou. Aux rochers Douvres, personne.

Les oiseaux de mer sont là chez eux.

Pas de rencontre plus redoutée. Les Casquets où s’est, dit-on, perdue la Blanche Nef, le banc du Calvados, les Aiguilles de l’île de Wight, la Ronesse qui fait la côte de Beaulieu si dangereuse, le bas-fond de Préel qui étrangle l’entrée de Merquel et qui force de ranger à vingt brasses la balise peinte en rouge, les approches traîtres d’étables et de Plouha, les deux druides de granit du sud de Guernesey, le vieux Anderlo et le petit Anderlo, la Corbière, les Hanois, l’île de Ras, recommandée à la frayeur par ce proverbe : — Si jamais tu passes le Ras, si tu ne meurs, tu trembleras ; — les Mortes-Femmes, le passage de la Boue et de la Frouquie, la Déroute entre Guernesey et Jersey, la Har-