Page:Hugo - Les Travailleurs de la mer Tome I (1891).djvu/362

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
356
LES TRAVAILLEURS DE LA MER

La mer était moins dormante sous la brume. On y entrevoyait quelques lames. Des lumières glacées flottaient à plat sur l’eau. Ces plaques de lueur sur la vague préoccupent les marins. Elles indiquent des trouées faites par le vent supérieur dans le plafond de brume. La brume se soulevait, et retombait plus dense. Parfois l’opacité était complète. Le navire était pris dans une vraie banquise de brouillard. Par intervalles ce cercle redoutable s’entr’ouvrait comme une tenaille, laissait voir un peu d’horizon, puis se refermait.

Le guernesiais, armé de sa longue-vue, se tenait comme une vedette à l’avant du bâtiment.

Une éclaircie se fit, puis s’effaça.

Le guernesiais se retourna effaré.

— Capitaine Clubin !

— Qu’y a-t-il ?

— Nous gouvernons droit sur les Hanois.

— Vous vous trompez, dit Clubin froidement.

Le guernesiais insista :

— J’en suis sûr.

— Impossible.

— Je viens d’apercevoir du caillou à l’horizon.

— Où ?

— Là.

— C’est le large. Impossible.

Et Clubin maintint le cap sur le point indiqué par le passager.

Le guernesiais ressaisit sa longue-vue.

Un moment après il accourut à l’arrière.

— Capitaine !