Page:Hugo - Les Travailleurs de la mer Tome I (1891).djvu/64

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totale, réelle ou conjecturée, du contribuable. Ceci a l’inconvénient de ne point attirer dans l’île les grands consommateurs. M. de Rothschild, s’il habitait à Guernesey quelque joli cottage acheté une vingtaine de mille francs, payerait quinze cent mille francs d’impôt par an. Ajoutons que, s’il ne résidait que cinq mois de l’année, il ne payerait rien. C’est le sixième mois qui est grave.

Climat, un printemps répandu. L’hiver, soit ; l’été sans doute ; mais sans excès ; jamais de Sénégal, jamais de Sibérie. Les îles de la Manche sont les îles d’Hyères de l’Angleterre. On y envoie les poitrines délicates d’Albion. Telle paroisse de Guernesey, Saint-Martin, par exemple, passe pour une petite Nice. Aucune Tempé, aucune Gémenos, aucun Val-Suzon ne dépasse la vallée des Vaux à Jersey et la vallée des Talbots à Guernesey. À ne voir que les versants méridionaux, rien de plus vert, de plus tiède et de plus frais que cet archipel. La high life y est possible. Ces petites îles ont leur grand monde. On y parle français, nous venons de le rappeler, on dit dans la haute société : Elle a-z-une rose à son chapeau. À cela près, conversations charmantes. Jersey admire le général Don ; Guernesey admire le général Doyle. Ce sont deux anciens gouverneurs du commencement de ce siècle. On trouve à Jersey Don-street et à Guernesey Doyle-road. En outre, Guernesey a bâti et dédié à son général une grande colonne qui domine la mer et qu’on voit des Casquets, et Jersey a fait cadeau au sien d’un cromlech. Ce cromlech avoisinait Saint-Hélier ; il était sur la colline où est aujourd’hui le fort Régent. Le général Don a accepté le cromlech, l’a fait charrier bloc à bloc sur le