Page:Hugo - Lucrèce Borgia, Dessau, 1833.djvu/85

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t. Et la main qui lui présenta le contre-poison, la voilà, elle tient cette fiole. Et la bouche qui lui dit de le boire, la voici, elle me parle !

Dona Lucrezia. Misérable femme que je suis !

Gennaro. écoutez, madame, je ne me méprends pas à vos semblans d’amour. Vous avez quelque sinistre dessein sur moi. Cela est visible. Vous devez savoir qui je suis. Tenez, dans ce moment-ci, cela se lit sur votre visage que vous le savez, et il est aisé de voir que vous avez quelque insurmontable raison pour ne me le dire jamais. Votre famille doit connaître la mienne, et peut-être à cette heure ce n’est pas de moi que vous vous vengeriez en m’empoisonnant ; mais, qui sait ? De ma mère !

Dona Lucrezia. Votre mère, Gennaro ! Vous la voyez peut-être autrement qu’elle n’est. Que diriez-vous si ce n’était qu’une femme criminelle comme moi ?

Gennaro. Ne la calomniez pas. Oh ! Non ! Ma mère n’est pas une femme comme vous, Madame Lucrèce ! Oh ! Je la sens dans mon cœur et je la rêve dans mon ame telle qu’elle est ; j’ai son image là, née avec moi ; je ne l’aimerais pas comme je l’aime si elle n’était pas digne de moi ; le cœur d