Page:Hugo - Ruy Blas, édition 1839.djvu/180

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Les ramassent, — mon cher, laisse-les ramasser.
Ne sois pas un mortel de trop farouche approche.
Si même ils en prenaient quelques-uns dans ta poche,
Sois indulgent. Ce sont des hommes comme nous.
Et puis il faut, vois-tu, c’est une loi pour tous,
Dans ce monde, rempli de sombres aventures,
Donner parfois un peu de joie aux créatures.

Avec mélancolie.

Tous ces gens-là seront peut-être un jour pendus !
Ayons donc les égards pour eux qui leur sont dus !
— Va-t’en.

Le laquais sort. Resté seul, don César se rassied, s’accoude sur la table, et paraît plongé dans de profondes réflexions.

Va-t’en.C’est le devoir du chrétien et du sage,
Quand il a de l’argent, d’en faire un bon usage.
J’ai de quoi vivre au moins huit jours ! Je les vivrai.
Et, s’il me reste un peu d’argent, je l’emploierai
À des fondations pieuses. Mais je n’ose
M’y fier, car on va me reprendre la chose.
C’est méprise sans doute, et ce mal adressé
Aura mal entendu, j’aurai mal prononcé…

La porte du fond se rouvre. Entre une duègne ; vieille, cheveux gris, basquine et mantille noires ; éventail.