Page:Hugo - William Shakespeare, 1864.djvu/128

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un poëte d’humanité, d’enthousiasme et de liberté. Peut-être, et quelques signes l’annoncent, le verra-t-on bientôt surgir du jeune groupe des écrivains allemands contemporains.

La musique, qu’on nous passe le mot, est la vapeur de l’art. Elle est à la poésie ce que la rêverie est à la pensée, ce que le fluide est au liquide, ce que l’océan des nuées est à l’océan des ondes. Si l’on veut un autre rapport, elle est l’indéfini de cet infini. La même insufflation la pousse, l’emporte, l’enlève, la bouleverse, l’emplit de trouble et de lueur et d’un bruit ineffable, la sature d’électricité et lui fait faire tout à coup des décharges de tonnerres.

La musique est le verbe de l’Allemagne. Le peuple allemand, si comprimé comme peuple, si émancipé comme penseur, chante avec un sombre amour. Chanter, cela ressemble à se délivrer. Ce qu’on ne peut dire et ce qu’on ne peut taire, la musique l’exprime. Aussi toute l’Allemagne est-elle musique en attendant qu’elle soit liberté. Le choral de Luther est un peu une marseillaise. Partout des Cercles de chant et des Tables de chant. En Souabe, tous les ans, la Fête du chant, aux bords du Neckar, dans la prairie d’Enslingen. La Liedermusik, dont le Roi des Aulnes de Schubert est le chef-d’œuvre, fait partie de la vie allemande. Le chant est pour