Page:Hugo - William Shakespeare, 1864.djvu/204

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chérubins et les marouts sont les mêmes êtres, les Souffles. Saumaise, du reste, a raison. Les jeux de mots, si fréquents dans la langue phénicienne, abondent dans Eschyle. Il joue, par exemple, à propos de Jupiter et d’Europe, sur le mot phénicien ilpha, qui a le double sens Navire et Taureau. Il aime cette langue de Tyr et de Sidon, et parfois il lui emprunte les étranges lueurs de son style ; la métaphore « Xerxès aux yeux de dragon » semble une inspiration du dialecte ninivite où le mot draka voulait dire à la fois le dragon et le clairvoyant. Il a des hérésies phéniciennes ; sa génisse Io est un peu la vache Isis ; il croit, comme les prêtres de Sidon, que le temple de Delphes a été bâti par Apollon avec une pâte faite de cire et d’ailes d’abeilles. Dans son exil de Sicile, il va souvent boire religieusement à la fontaine Aréthuse, et jamais les pâtres qui l’observent ne l’entendent nommer Aréthuse autrement que de ce nom mystérieux, Alphaga, mot assyrien qui signifie source entourée de saules.

Eschyle est, dans toute la littérature hellénique, le seul exemple de l’âme athénienne mélangée d’Egypte et d’Asie. Ces profondeurs répugnaient à la lumière grecque. Corinthe, Épidaure, Œdepsus, Gythium, Chéronée, où Plutarque devait naître, Thèbes, où était la maison de Pindare, Mantinée, où était la gloire d’Épaminondas,