Page:Hugo - William Shakespeare, 1864.djvu/267

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comédie, la féerie, l’hymne, la farce, le vaste rire divin, la terreur de l’horreur, et, pour tout dire en un mot, le drame. Il touche aux deux pôles. Il est de l’olympe et du théâtre de la foire. Aucune possibilité ne lui manque.

Quand il vous tient, vous êtes pris. N’attendez de lui aucune miséricorde. Il a la cruauté pathétique. Il vous montre une mère, Constance mère d’Arthur, et quand il vous a amené à ce point d’attendrissement que vous ayez le même cœur qu’elle, il tue son enfant ; il va en horreur plus loin même que l’histoire, ce qui est difficile ; il ne se contente pas de tuer Rutland et de désespérer York ; il trempe dans le sang du fils le mouchoir dont il essuie les yeux du père. Il fait étouffer l’élégie par le drame, Desdemona par Othello. Nulle atténuation à l’angoisse. Le génie est inexorable. Il a sa loi et la suit. L’esprit aussi a ses plans inclinés, et ces versants déterminent sa direction. Shakespeare coule vers le terrible. Shakespeare, Eschyle, Dante, sont de grands fleuves d’émotion humaine penchant au fond de leur antre l’urne des larmes.

Le poëte ne se limite que par son but ; il ne considère que la pensée à accomplir ; il ne reconnaît pas d’autre souveraineté et pas d’autre nécessité que l’idée ; car, l’art émanant de l’absolu, dans l’art comme dans l’absolu, la fin justifie