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À Adèle Hugo, à Londres.


21 juillet 1859.

Tu te trompes, chère enfant, un sourire et un embrassement de toi me sont plus doux que toutes les fleurs d’ici-bas et tous les rayons de là-haut. Il me tarde bien de vous revoir, ta mère et toi ; c’est une triste fête que ma fête aujourd’hui ; l’an passé, la maladie ; cette année, l’absence.

Enfin, pourvu que vous reveniez toutes deux bien portantes, je trouverai tout bien arrangé par le bon Dieu. Mais vous avez mal choisi le moment de votre villégiature ; on me dit de tous les côtés que la Tamise empeste et empoisonne Londres en été ; les journaux sont pleins de détails hideux sur le curage qu’on a été forcé d’interrompre. Dépêchez-vous donc de sortir de ce typhus.


À Paul Meurice[1].


29 juillet [1859].

Je le crois bien qu’il faut toute âme. Quelle bonté et quelle tendre déférence vous avez de discuter cela ! C’eût été tout bonnement une grosse faute. La recommandation de Hetzel serait dangereuse si elle allait jusqu’à protéger de telles bévues. Voici de quoi il est question (mais d’abord, cher et admirable ami, il faut que je vous dise combien je suis heureux que vous soyez content. Vous êtes cinq ou six qui êtes pour moi les étoiles du succès. Je crois en effet qu’il y a quelque chose dans ce livre. Maintenant je ferme la parenthèse, et je viens à l’affaire correction d’épreuves). J’ai en effet un peu mon orthographe et ma ponctuation. Tout écrivain a la sienne, à commencer par Voltaire. L’intelligence de l’imprimeur est de respecter cette orthographe qui fait partie du style de l’écrivain. Ainsi j’écris lys et non lis. Je vous ai déjà dit pourquoi. Les correcteurs ont deux maladies, les majuscules et les virgules, deux détails qui défigurent ou coupent le vers. Je les épouille le plus que je peux. Les correcteurs ordinaires ne se doutent pas qu’un vers n’a pas la même physionomie qu’une ligne de prose, et que cette physionomie, gâtée quelquefois par une grosse lettre intempestive, doit être en quelque sorte étudiée vers à vers. Vous pouvez lire ceci à M. Claye qui est, je le sais, fort distingué d’esprit, et qui comprendra.

  1. Inédite.