semblerait bien difficile, sinon impossible, de faire, avec quelque éditeur que ce soit, un traité d’ensemble avant d’avoir terminé le livre 93. Alors seulement je serai maître de mon loisir, et je pourrai entreprendre, avec suite et sans lacune, la série de mes publications futures. Ce 93 à faire me crée une sorte de servitude ; c’est la servitude d’un devoir ; car il y a du devoir dans ce livre.
Je suis forcé d’ajourner votre proposition, et d’autres ; mais, je vous prie, ne vous méprenez pas. Laissons de côté les petits détails, et soyez sûr qu’il ne tiendra pas à moi que nos relations de cordialité et d’affaires ne continuent, non seulement sans décroître, mais encore en s’améliorant.
Croyez-moi bien affectueusement à vous.
... De toutes les prisons, celle que je connais le mieux, c’est l’exil. Voilà seize ans bientôt que je tourne dans cette cage.
Enfant, j’allais jouer au Jardin des plantes, je montais sur le labyrinthe, et j’apercevais un grand toit plat avec une guérite et un soldat flânant, l’arme au bras. Ma mère me disait : C’est une prison !
La prison peut être fort grande. Une chose plate sur laquelle marche le soldat, c’est aujourd’hui l’Europe.
Plus tard, j’ai connu l’intérieur de Sainte-Pélagie par deux de mes vieux amis, Béranger et Lamennais. Béranger, peu de temps avant sa mort, m’écrivait : — J’ai commencé par la prison et vous finissez par l’exil. Et je lui répondais : Tout est bien. Espérons, mon cher ami, l’avenir est une aube.
Je vous serre cordialement la main.
Vous m’avez écrit sur ce cri de colère et de devoir des choses hautes et profondes. Votre lettre m’a ravi, cher Auguste, et aussi, et surtout encore,