Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Histoire, tome I.djvu/201

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Il croit à l’adhésion des prolétaires, il croit à la bonne volonté des rois, il croit à la fête des aigles, il croit aux harangues du conseil d’État, il croit aux bénédictions des évêques, il croit au serment qu’il s’est fait jurer, il croit aux sept millions cinq cent mille voix !

Il parle à cette heure, se sentant en humeur d’Auguste, d’amnistier les proscrits. L’usurpation amnistiant le droit ! la trahison amnistiant l’honneur ! la lâcheté amnistiant le courage ! le crime amnistiant la vertu ! Il est à ce point abruti par son succès qu’il trouve cela tout simple.

Bizarre effet d’enivrement ! illusion d’optique ! il voit dorée, splendide et rayonnante cette chose du 14 janvier, cette Constitution souillée de boue, tachée de sang, ornée de chaînes, traînée au milieu des huées de l’Europe par la police, le sénat, le corps législatif et le conseil d’État ferrés à neuf ! Il prend pour un char de triomphe et veut faire passer sous l’arc de l’Étoile cette claie sur laquelle, debout, hideux et le fouet à la main, il promène le cadavre sanglant de la République !