Page:Hugo Hernani 1889.djvu/159

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Hernani.

Oh ! je suis ton esclave ! Oui, demeure, demeure !
Fais ce que tu voudras. Je ne demande rien.
Tu sais ce que tu fais ! ce que tu fais est bien !
Je rirai si tu veux, je chanterai. Mon âme
Brûle. Eh ! dis au volcan qu’il étouffe sa flamme,
Le volcan fermera ses gouffres entr’ouverts,
Et n’aura sur ses flancs que fleurs et gazons verts.
Car le géant est pris, le Vésuve est esclave,
Et que t’importe à toi son cœur rongé de lave ?
Tu veux des fleurs ? c’est bien ! Il faut que de son mieux
Le volcan tout brûlé s’épanouisse aux yeux !

Doña Sol.

Oh ! que vous êtes bon pour une pauvre femme,
Hernani de mon cœur !

Hernani.

Hernani de mon cœur !Quel est ce nom, madame ?
Ah ! ne me nomme plus de ce nom, par pitié !
Tu me fais souvenir que j’ai tout oublié !
Je sais qu’il existait autrefois, dans un rêve,
Un Hernani dont l’œil avait l’éclair du glaive,
Un homme de la nuit et des monts, un proscrit,
Sur qui le mot vengeance était partout écrit,
Un malheureux traînant après lui l’anathème !
Mais je ne connais pas ce Hernani. — Moi, j’aime
Les prés, les fleurs, les bois, le chant du rossignol.
Je suis Jean d’Aragon, mari de doña Sol !
Je suis heureux !

Doña Sol.

Je suis heureux !Je suis heureuse !

Hernani.

Je suis heureux ! Je suis heureuse !Que m’importe
Les haillons qu’en entrant j’ai laissés à la porte ?