Page:Hugo Rhin Hetzel tome 1.djvu/104

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panneaux qui sont évidemment d’Albert Durer. Outre le crâne et le bras, l’armoire contient : le cor de Charlemagne, énorme dent d’éléphant évidée et sculptée curieusement vers le gros bout ; la croix de Charlemagne, bijou où est enchâssé un morceau de la vraie croix et que l’empereur avait à son cou dans son tombeau ; un charmant ostensoir de la renaissance donné par Charles-Quint, et gâté au siècle dernier par un surcroît d’ornements sans goût ; les quatorze plaques d’or couvertes de sculptures byzantines qui ornaient le fauteuil de marbre du grand empereur ; un ostensoir donné par Philippe II, qui reproduit le profil du dôme de Milan ; la corde dont fut lié Jésus-Christ pendant la flagellation ; un morceau de l’éponge imbibée de fiel dont on l’abreuva sur la croix ; enfin la ceinture de la sainte vierge, en tricot, et la ceinture de Jésus-Christ, en cuir. Cette petite lanière, tordue et roulée sur elle-même comme un fouet d’écolier, a occupé trois empereurs ; de Constantin, lequel apposa dessus son sigillum, qui y est encore et que j’y ai vu, elle est tombée à Haroun-al-Raschid, qui l’a donnée à Charlemagne.

Tous ces objets vénérables sont enfermés dans d’étincelants reliquaires gothiques et byzantins, qui sont autant de chapelles, de flèches et de cathédrales microscopiques en or massif, auxquelles les saphirs, les émeraudes et les diamants tiennent lieu de vitraux.

Au milieu de ces innombrables joyaux entassés sur les deux étages de l’armoire s’élèvent, comme deux montagnes d’or et de pierreries, deux grosses châsses d’une valeur immense et d’une beauté miraculeuse. La première, la plus ancienne, qui est byzantine, entourée de niches où sont assis, la couronne en tête, seize empereurs, contient le reste des os de Charlemagne et ne s’ouvre jamais. La seconde, qui est du douzième siècle, et que Frédéric Barberousse a donnée à l’église, renferme les fameuses grandes reliques dont je vous ai parlé au commencement de cette lettre, et ne s’ouvre que tous les sept ans. Une seule ouverture de cette châsse, en 1496, attira cent quarante-deux mille pèlerins, et rapporta en quinze jours quatorze mille florins d’or.

Cette châsse n’a qu’une clef. Cette clef est cassée en