Page:Hugo Rhin Hetzel tome 2.djvu/218

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Les deux premiers crimes étaient presque des crimes ordinaires. La guerre, dans ces temps que nous admirons trop quelquefois, y accoutumait les hommes. Le dernier était un attentat monstrueux.

La mort fut violée, et avec la mort, chose qu’on n’avait pas vue encore, la majesté royale, et avec la majesté royale toute l’histoire d’un grand peuple, tout le passé d’un grand empire. Les soldats fouillèrent les cercueils, arrachèrent les suaires, volèrent à des squelettes, majestés endormies, leurs sceptres d’or, leurs couronnes de pierreries, leurs anneaux qui avaient scellé la paix et la guerre, leurs bannières d’investiture, hastas vexilliferas. Ils vendirent à des juifs ce que des papes avaient béni. Ils brocantèrent cette pourpre en haillons et ces grandeurs couvertes de cendres. Ils trièrent avec soin l’or, les diamants et les perles ; et, quand il n’y eut plus rien de précieux dans ces sépulcres, quand il n’y eut plus que de la poussière, ils balayèrent pêle-mêle dans un trou ces ossements qui avaient été des empereurs. Des caporaux ivres roulèrent avec le pied dans une fosse commune les crânes de neuf césars.

Voilà ce que fit Louis XIV en 1693. Juste cent ans après, en 1793, voici ce que fit Dieu.

Il y avait en France un tombeau royal comme il y avait un ossuaire impérial en Allemagne. Un jour, jour fatal où toute la barbarie de dix siècles reparut à la surface de la civilisation et la submergea, des hordes hideuses, horribles, armées, qui apportaient la guerre, non plus à un roi, mais à tous les rois, non plus à une cathédrale, mais à toute religion, non plus à une ville ou à un état, mais à tout le passé du genre humain ; des hordes effrayantes, dis-je, sanglantes, déguenillées, féroces, se ruèrent sur l’antique sépulture des rois de France. Ces hommes, que rien n’arrêta dans leur œuvre redoutable, venaient aussi pour briser des tombes, déchirer des linceuls et profaner des ossements. Étranges et mystérieux ouvriers, ils venaient mettre de la poussière en poussière. écoutez ceci : ― le premier spectre qu’ils éveillèrent, le premier roi qu’ils arrachèrent brutalement du cercueil, comme on secoue un valet qui a trop longtemps dormi, le premier