il n’y a qu’un pas, elle prend les Laquedives ; après quoi elle étend la main et saisit l’Hindoustan, tout l’Hindoustan, Calcutta, Madras et Bombay, ces trois provinces de la compagnie des Indes, grandes comme des empires ; et sept royaumes, Népaul, Oude, Barode, Nagpour, Nizam, Maïssour et Travancore. Là elle touche à la Russie ; le Turkestan chinois seul l’en sépare. Maîtresse du golfe d’Oman, que borde l’immense côte qu’elle possède de Haydérabad à Trivanderam, elle atteint la Perse et la Turquie par le golfe Persique, qu’elle peut fermer, et l’égypte par la mer Rouge, qu’elle peut bloquer également. L’Hindoustan lui donne Ceylan. De Ceylan elle se glisse entre les îles Nicobar et les îles Andamans, prend terre sur la longue côte des monts Mogs, dans l’Indo-Chine, et la voilà qui tient le golfe du Bengale. Tenir le golfe du Bengale, c’est faire la loi à l’empire des birmans. Les monts Mogs lui ouvrent la presqu’île de Malacca ; elle s’y étend et s’y consolide. De Malacca elle observe Sumatra, des îles Singapour elle observe Bornéo. De cette façon, possédant le cap Romania et le cap Comorin, elle a les deux grandes pointes d’Asie comme elle a la pointe d’Europe, comme elle a la pointe d’Afrique.
A l’heure où nous sommes, elle attaque la Chine de vive force après avoir essayé de l’empoisonner, ou du moins de l’endormir.
Ce n’est pas tout ; il reste deux mondes, la Nouvelle-Hollande et l’Amérique, elle les saisit. De Malacca, elle traverse le groupe inextricable des îles de la Sonde, cette conquête de la vieille navigation hollandaise, et s’empare de la Nouvelle-Hollande tout entière, terre vierge qu’elle féconde avec des forçats, et qu’elle garde jalousement, crénelée dans les îles Bathurst au nord et dans l’île de Diemen au sud, comme dans deux forteresses.
Puis elle suit un moment la route de Cook, laisse à sa gauche les six archipels de l’Océanie, louvoie devant la longue muraille des Cordillères et des Andes, double le cap Horn, remonte les côtes de la Patagonie et du Brésil, et prend terre enfin sous l’équateur au sommet de l’Amérique méridionale, à Stabrock, où elle crée la Guyane anglaise. Un pas, et elle est maîtresse des îles du Vent, ce cromlech d’îles qui clôt la mer des Antilles ; un autre pas,