TROISIEME ESSAI.
Sur la liaison des idées.
Il est évident qu’il y a des principes qui
lient nos pensées, car elles sont introduites
dans l’esprit les unes par les autres : c’est avec
un certain degré de méthode & de régularité
qu’elles se présentent à la mémoire ou
à l’imagination. Cela se remarque aisément
dans les réflexions soutenues, & dans les
discours sérieux. Une pensée étrangère vient-elle
troubler la marche, ou rompre la chaîne
de nos idées, nous nous en appercevons aussitôt,
& nous la mettons à l’écart. Que dis-je ?
Dans nos rêveries les plus vagues & les plus
extravagantes, dans nos songes même, l’imagination
ne court pas tout-à-fait à l’aventure :
en y réfléchissant, on découvre toujours de
la liaison entre les idées qui se succedent.
Si l’on écrivoit la conversation la plus libre
& la plus décousue en apparence, il arriveroit
de deux choses l’une ; ou l’on verroit