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Page:Hume - Œuvres philosophiques, tome 3, 1788.djvu/87

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De La Religion.

fert des victimes humaines, n’ont gueres à rougir devant les inquisiteurs & les persécuteurs de Rome & de Madrid ; peut-être ont-ils moins répandu de sang ; ces victimes, d’ailleurs, que l’on tiroit au sort, ou que l’on déterminoit par quelque marque extérieure, ne pouvoient pas intéresser si fort le reste de la société ; au lieu que les foudres de l’inquisition ne tombent que sur la vertu, la science, & l’amour de la liberté : ces qualités étant bannies, il ne reste que la honteuse ignorance, la dépravation des mœurs, & le vil esclavage. La mort de plusieurs milliers exterminés par la peste, par la famine, ou par quelque autre calamité publique, est moins préjudiciable à la société que le meurtre

    Un sacrifice est considéré comme un présent & faire présent d’une chose à la divinité, c’est la détruire & la rendre inutile aux hommes : on brûle ce qui est solide, on répand ce qui est liquide, on tue ce qui est animé : en nous faisant tort nous croyons rendre service à Dieu, ou donner au moins des marques d’affection & de bonne volonté : c’est ainsi que trompés nous-mêmes par notre dévotion mercenaire nous nous imaginons de pouvoir tromper l’Être que nous adorons.