Page:Hume - Œuvres philosophiques, tome 5, 1788.djvu/223

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
215
de Morale.

je m’écrie, Messieurs, en peignant Cléante vous venez de peindre le vrai mérite ; chacun de vous a donné son coup de pinceau, & sans y penser vous avez été plus loin que Gracian ou Castiglione. Un philosophe pourroit choisir ce caractere comme un modele de vertu dans toute sa perfection.

Comme toute qualité qui est utile ou agréable soit aux autres, soit à nous-mêmes, est appellée vertu ou mérite personnel, jamais on ne se trompera sur cette dénomination, en jugeant d’après la raison naturelle, & non obscurcie par les préjugés de la superstition & d’une fausse religion. Pourquoi le célibat, les jeûnes, les macérations, l’abnégation de soi-même, l’humilité, le silence, la retraite & toutes les vertus monacales sont-elles rejetées par tous les hommes sensés ? C’est parce qu’elles ne mènent à rien, qu’elles ne contribuent en rien à l’avancement d’un homme, qu’elles ne le rendent point plus estimable dans la société, qu’elles ne donnent point le talent de plaire dans le monde, enfin parce qu’elles ne lui apprennent point à jouir de lui-même. Au con-