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Dialogue.

Qu’entendez-vous, lui dis-je, par une vie & des mœurs artificielles ? Je m’explique, me dit-il, vous savez que dans l’antiquité la religion n’influoit que très-peu sur la vie ordinaire ; lorsque les hommes avoient fait leurs sacrifices & leurs prieres dans les temples, ils croyoient que les dieux les laissoient maîtres du reste de leur conduite, & ne s’embarrassoient gueres des vertus ou des vices qui n’intéressoient que la paix ou le bonheur de genre humain. Dans ces tems, il n’appartenoit qu’à la philosophie de régler la conduite des hommes. En conséquence comme elle fournissoit le seul moyen de s’élever au-dessus des autres, elle devoit prendre un fort grand ascendant sur les hommes, & produire une foule de singularités dans les maximes & dans la conduite. Actuellement que la philosophie a perdu les attraits de la nouveauté, elle n’a plus tant d’inflence & paroît se borner à de pures spéculations de cabinet, de même que la religion ancienne se bornoit à des sacrifices dans l’intérieur d’un temple. Aujourd’hui la religion a pris la place de la