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Moraux et Politiques

Et fit aimer son joug à l’Anglois indompté,

Qui ne peut ni servir ni vivre en liberté[1],

En suivant ces idées, nous voyons, dans le gouvernement des empereurs romains, un mélange où le despotisme prévaut sur la liberté, & dans le nôtre un mélange où la liberté prévaut sur le despotisme. Les suites, de part & d’autre, sont, ainsi qu’on devoit s’y attendre, exactement conformes à la proposition que je veux établir. C’est le propre des formes mixtes de produire une jalousie réciproque entre le souverain & les sujets. Plusieurs des empereurs de Rome étoient des tyrans affreux, l’horreur de la nature & l’opprobre du genre humain : mais les motifs qui les portèrent à ces détestables cruautés, ne sont point inconnus, ils savoient fort bien que tous les patrices romains voyoient de mauvais œil l’empire entre les mains d’une famille qui, peu de tems auparavant, avoit été, tout au plus, leur égale ; & c’est ce qui excitoit & nourrissoit leurs jalouses fu-

  1. Henriade, liv. I.