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Page:Hume - Œuvres philosophiques, tome 7, 1788.djvu/51

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sur le Luxe.

aller aux excès répréhensibles, parce que ces excès sont le tombeau des vrais plaisirs. On peut assurer avec vérité, qu’il y a bien plus de grossiere gloutonnerie dans les repas des Tartares, dont les festins consistent en viande de cheval, que dans les repas délicats des courtisans de l’Europe. Si l’amour illégitime & l’infidélité dans le mariage sont plus fréquens dans les siecles de luxe, l’ivrognerie, vice plus honteux & plus nuisible au corps & à l’esprit, s’y montre bien plus rarement. Je ne prendrai pas seulement Ovide & Petrone pour juges de cette proportion, mais je m’en rapporrerai à Seneque ou à Caton. Nous savons que César ayant été obligé, dans le tems de conspiration de Catilina, de remettre entre les mains de Caton un écrit qui ne laissoit aucun doute de son intrigue galante avec Servilie, propre sœur de Caton ; ce philosophe austere le lui jeta avec indignation, & l’appella, dans l’aigreur de sa colere, ivrogne, expression qui lui paroissoit plus injurieuse que celle dont il auroit eu plus de raison de se servir.