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ENQUÊTE

lisme ! Il n’existe, en effet, presque pas d’écrivain dont la forme et le fond ne soient aujourd’hui très imprégnés de naturalisme : minutie de descriptions immédiates, brutalités de mots, analyse en surface. Et de la défroque du romantisme, sinon de sa chaleur de gestes, croyez-vous que nous soyons débarrassés ? Mais, soit, je l’admets, le romantisme est mort, il a expectoré un énorme hoquet d’agonie synthétique avec Hugo, et le naturalisme l’a suivi. Qu’avons-nous à la place ? Pas grand’chose.

Ce sont les philosophes qui mènent l’art, n’est-ce pas ? Eux seuls, poètes, comptent et restent.

Après Littré, qui a produit le naturalisme, avec cette formule dite positive : ne nous occupons que de ce que nous voyons et allons au plus près, partant au plus vulgaire, nous avons eu Renan qui a engendré (c’est biblique !) le dilettantisme, les psychologues fins, fins, et les gris de l’École normale, des gens de valeur et d’étude analytique qui tiennent en somme la faveur du public lettré en ce moment. Ce sont MM. Bourget, nos amis Rod, Desjardins, M. Lemaître, l’historiographe un peu lourd de ces messieurs, et, dernière pousse de la branche, Maurice Barrès dont le Moi-néant a de la grâce, et l’afféterie importante beaucoup de piquant ; on ne saurait guère reprocher à ce dernier que de dîner de Stendhal et de souper d’Ignace de Loyola. Qui encore, là ? M. Anatole France qui fréquente aux écoles d’Alexandrie,