se sont si bien entre-dévorés, vos chevaliers du symbole, qu’il n’en reste plus ! J’ai lu cette curieuse série d’interviews ! Cela m’a fait penser aux combats de coqs. Ah ! tous ces paons, qui s’arrachaient les plumes en faisant la roue. Vous les avez vus, vous, comment sont-ils ? Lorsque je les ai connus, ils blanchissaient déjà ! Moréas touche à la quarantaine, Tailhade a dépassé quarante-cinq ans. Ils ont donné ce qu’ils pouvaient donner. Je ne crois pas que ce soit eux le jeune attendu, vous savez !
En fait d’idées, jusqu’à présent, ils n’ont guère sorti que des couteaux !
— Le mouvement symbolique…
— Il n’y a pas de mouvement, une simple petite poussée de talents, de très réels talents, mais disparates, sans cohésion. Vous avez bien vu qu’ils ne marchent pas derrière un drapeau, derrière une idée commune. Je vois de jolis phraseurs, d’élégants chanteurs, mais pas plus… Il y a d’exquis roseaux, de délicieuses petites flûtes, mais pas de clairon…
C’est la presse qui, très arbitrairement, a groupé tous ces noms sous ces étiquettes de décadents et de symbolistes… On a confondu sous une seule enseigne les écrivains les plus divers. Les maîtres comme Verlaine et Mallarmé, de vrais jeunes comme Barrès, Régnier, Griffin, pêle-mêle avec les ratés, les piliers de café, les éternels jeunes à poils blancs… Et tous ont laissé dire… pour avoir l’air d’être beaucoup !