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SUR L’ÉVOLUTION LITTÉRAIRE

mais où, à côté d’Henri de Régnier et de Vielé-Griffin, Bernard Lazare donne de fort belles légendes, d’une langue fastueuse et sonore, que beaucoup de poètes pourraient envier à ce prosateur. Voici le Mercure de France avec Rémi de Gourmont, l’auteur de Sixtine, l’un des plus rares et plus raffinés écrivains que je connaisse. Alfred Vallette, Jules Renard, Aurier, Dubus, Saint-Pol-Roux, et — ne l’oublions pas — le féroce Laurent Tailhade !

— N’oublions pas non plus le vers libre !

— Oh ! ce serait faire de l’esthétique, et c’est tellement inutile ! Cependant, si vous y tenez, je crains que le vers libre ne nuise à l’illusion ; il a huit, quinze, dix-sept, trois syllabes ; il n’est point étrange alors qu’il paraisse avoir la longueur qu’il a réellement, tandis que l’alexandrin, avec ses douze syllabes immuables, donne l’impression — parfaitement mensongère — de durer beaucoup plus ou beaucoup moins : c’est là un jeu divin de miracle et de mystère. Mais, après tout, le principal est de faire de beaux poèmes, chacun dans son coin, n’importe comment !