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rapports anatomiques

en maintenant aux membres du gorille. Les divisions terminales du membre antérieur ne présentent aucune difficulté : os pour os, muscle pour muscle sont disposés essentiellement comme chez l’homme ou avec des différences si minimes qu’elles se rencontrent chez les variétés d’hommes. La main du gorille est plus massive, plus lourde, et elle a un pouce proportionnellement un peu plus court que celui de l’homme[1]. Mais personne n’a jamais mis en doute que ce ne fût là une véritable main.

  1. Dans une communication faite à l’Académie des sciences (17 août 1864), Gratiolet a publié les recherches qu’il avait entreprises avec le concours de M. Alix, sur le bras et la main des anthropoïdes comparés à ceux de l’homme. Il trouve que les muscles du pouce présentent une différence « capitale » chez le gorille et chez l’homme. Chez l’homme, le pouce est fléchi par un muscle indépendant, le long fléchisseur, qui s’insère à l’extrémité antérieure de la seconde phalange du pouce ; chez les singes, ce fléchisseur n’est pas indépendant ; il est représenté par une division du tendon du muscle fléchisseur commun des autres doigts ; mais, chez le gorille et chez le chimpanzé, ce muscle est réduit à un filet tendineux qui n’a plus aucune action, car son origine se perd dans les replis synoviaux des tendons fléchisseurs des autres doigts, et il n’aboutit à aucun faisceau musculaire. Enfin, chez l’orang, il n’y a plus aucune trace de fléchisseur, et le pouce est fléchi par les fibres marginales de l’adducteur du pouce, ce qui, d’après Gratiolet, est « un artifice du Créateur, » pour rendre cette main plus parfaite. Je ne pense pas qu’il en eût beaucoup plus coûté au Créateur de donner à l’orang un vrai fléchisseur, au lieu de détourner artificiellement l’adducteur de ses fonctions. — Quoi qu’il en soit, il est question, dans le texte même du mémoire déjà cité sur le Troqlodydes Aubryi (p. 172), d’un filament fibreux, qui se détache vers la base de la première phalange du pouce et s’enfonce sous le ligament annulaire. « Cependant, ajoutent les auteurs, nous nous refusons à voir, dans ce filament inutile, un vestige de muscle. » Je n’ai garde de mettre en doute la science d’un Gratiolet, ni celle de son digne élève, M. Alix. Cependant ne pourrait-on, avant de se refuser à voir, attendre que de nouvelles dissections viennent confirmer les résultats d’un premier examen. Malheureusement, les occasions sont rares et les muscles grêles qui ont subi des altérations cadavériques se perdent aisément ; aussi est-on en droit de conserver quelques doutes à l’endroit de ce filament inutile qui pourrait devenir quelque jour un long fléchisseur. Il est bien aventureux sur une aussi petite différence anatomique d’étayer des différences « profondes et réel-