Page:Huxley - De la place de l'homme dans la nature.djvu/347

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
320
sur quelques ossements humains fossiles.


    l’homme n’ont donc fait que confirmer une notion vraisemblable. Quant à la période glaciaire, son influence destructive n’a pas été absolue ; la vie n’a point été anéantie sur notre hémisphère ; bien des espèces ont survécu dans tous les genres qui ont de nouveau peuplé le sol après la retraite des glaciers, dont la fusion a été l’un des principaux agents de la configuration actuelle du sol. Toutes ces périodes ont été excessivement longues, tellement qu’il est impossible de les évaluer par les mesures ordinaires de temps. Quant à la période quaternaire, on a tenté diverses applications approximatives. Le Dr  Dowler a évalué l’âge des ossements humains découverts dans les tourbières de la Louisiane, où l’on a pu constater onze couches successives de forêts de cyprès et de chênes dont la durée totale, calculée d’après l’âge des troncs les plus vieux, doit être, au minimum, de cent cinquante-huit mille ans. À cinq mètres de profondeur, sous les racines d’un cyprès appartenant à la quatrième couche inférieure, on a trouvé du charbon de bois, un squelette humain dont la date établie d’après le calcul indiqué plus haut est au minimum de cinquante-sept mille six cents ans ; Lyell a déterminé par le calcul du temps nécessaire au dépôt des alluvions, que d’après les plus basses estimations la formation du delta du Mississipi a demandé cent mille ans ; or, à Natchez, Dickeson a trouvé un os pelvien humain associé au mastodonte, et au megalonyx, dans un lœss ancien que Lyell a démontré être de formation antérieure au delta du Mississipi, et postérieure aux alluvions de la vallée de la Somme (L’ancienneté de l’homme, etc. p. 210). Les calculs de M. Morlot, fondés sur l’accroissement du cône formé par les matériaux transportés par le torrent de la Tinière, donnent, pour la formation de cette éminence environ cent siècles ; or, les débris humains les plus anciens que nous offre le cône de la Tinière, paraissent appartenir à l’âge de pierre le plus récent et remonter à une antiquité de cinq à sept mille ans.

    Mais un autre cône au-dessus de celui de la Tinière, et qui appartient aux alluvions quaternaires, a, par les mêmes calculs, au moins mille siècles. Par des calculs analogues, M. Gillieron attribue une antiquité de six à sept mille ans à l’époque des habitations lacustres de l’âge de la pierre polie. Mais, dans la vallée du Nil, Horner a trouvé à la profondeur de 13 mètres un vase en poterie de terre ; ce qui, d’après des évaluations discutables sur l’épaisseur annuelle des sédiments, donnerait une antiquité de près de douze mille ans. Linant-bey a trouvé un fragment de brique rouge qui avait été enfoui à une époque fixée par des calculs semblables, à trente mille ans. On voit, par cette liste de tentatives que nous pourrions de beaucoup allonger, que la chronologie paléontologique est loin d’être uniforme. Si l’on passe aux formations tertiaires, les évaluations deviennent énormes. En sorte que les partisans de la transformation des espèces ne peuvent être gênés d’aucun côté par le temps, qui, dans cette question, « fait tout à l’affaire. » Quoi qu’il en soit, la chronologie préhistorique est un problème qui se présente avec tous les caractères que réclame la méthode positive. On peut donc en espérer la solution. (Trad.)