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le quartier saint-séverin

tons, des colonnes d’ordre dorique et une salle aux croisées ogivales devenue un lavoir subsistent encore dans la cour du numéro 15 de la rue de la Bûcherie. Il y a quelques années, ce domaine, peint en vert et coiffé d’une rotonde, était estampé d’un énorme chiffre, et, les soirs d’été, sous l’œil vigilant d’une mégère, appelée la Chouette, des femmes sans âge, des Parques avec des faces grimées, des cheveux en brioche sur la tête et, dans des corsages évidés, des boulets mous, se penchaient sur le seuil ; et ça appelait. Ce clapier occupait l’ancien amphithéâtre de dissection ; la destination de cet immeuble avait, on le voit, à peine changé ; un étal de chairs défraîchies avait tout bonnement remplacé une boucherie de chairs mortes.

Cette industrie a disparu et actuellement la Tour s’est métamorphosée en un cabaret et en une auberge.

Pour en revenir à la rue de la Bûcherie, elle se traîne, après avoir dépassé la rue de l’Hôtel-Colbert, en deux lignes de tristes cassines dont les ouvertures brillent ainsi que des chatières sur des creux d’ombre. L’une de ces bicoques, le numéro 16, a pourtant plus avenante mine avec sa porte cochère badigeonnée de pain d’épice et carrelée de clous ; elle est l’ancienne maison dite de Notre-Dame, qui étendait jadis derrière sa façade, jusqu’aux rives de la Seine, des chantiers de bois.

Et cette rue finit par mourir dans le bas de la place