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Page:Huysmans - Là-Bas, Tresse & Stock, 1895.djvu/247

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Il erre dans les forêts qui entourent Tiffauges, des forêts noires et épaisses, profondes, telles que la Bretagne en recèle encore à Carnoët.

Il sanglote, en marchant, écarte, éperdu, les fantômes qui l’accostent, regarde, et soudain il voit l’obscénité des très vieux arbres.

Il semble que la nature se pervertisse devant lui et que ce soit sa présence même qui la déprave ; pour la première fois, il comprend l’immuable salacité des bois, découvre des priapées dans les futaies.

Ici, l’arbre lui apparaît comme un être vivant, debout, la tête en bas, enfouie dans la chevelure de ses racines, dressant des jambes en l’air, les écartant, puis se subdivisant en de nouvelles cuisses qui s’ouvrent, à leur tour, deviennent de plus en plus petites, à mesure qu’elles s’éloignent du tronc ; là, entre ces jambes, une autre branche est enfoncée, en une immobile fornication qui se répète et diminue, de rameaux en rameaux, jusqu’à la cime ; là encore, le fût lui semble être un phallus qui monte et disparaît sous une jupe de feuilles ou bien, il sort au contraire, d’une toison verte et plonge dans le ventre velouté du sol.

Des images l’effarent. Il revoit les peaux garçonnières, les peaux du blanc lucide des parchemins, dans les écorces pâles et lisses des longs