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Pontmartin et du minable Féval, et où il avait confié aux domestiques, pour un commun usage, les historiettes des Aubineau et des Lasserre, ces bas hagiographes des miracles opérés par M. Dupont de Tours et par la Vierge.

En somme, des Esseintes n’extrayait même point de cette littérature, une passagère distraction à ses ennuis ; aussi repoussait-il dans les angles obscurs de sa bibliothèque ces amas de livres qu’il avait jadis étudiés, lorsqu’il était sorti de chez les Pères. — J’aurais bien dû abandonner ceux-là à Paris, se dit-il, en dénichant derrière les autres, des livres qui lui étaient plus particulièrement insupportables, ceux de l’abbé Lamennais et ceux de cet imperméable sectaire, si magistralement, si pompeusement ennuyeux et vide, le comte Joseph de Maistre.

Un seul volume restait installé sur un rayon, à portée de sa main, l’Homme, d’Ernest Hello.

Celui-là était l’antithèse absolue de ses confrères en religion. Presque isolé dans le groupe pieux que ses allures effarouchaient, Ernest Hello avait fini par quitter ce chemin de grande communication qui mène de la terre au ciel ; sans doute écœuré par la banalité de cette voie, et par la cohue de ces pèlerins de lettres qui suivaient à la queue leu-leu, depuis des siècles, la même chaussée, marchant dans les pas les uns des autres, s’arrêtant aux mêmes endroits, pour échanger les mêmes lieux communs sur la religion, sur les Pères de l’Église,