Page:Huysmans - A Rebours, Crès, 1922.djvu/295

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son puissant unisson, ses harmonies solennelles et massives, ainsi que des pierres de taille, put s’accoupler avec les vieilles basiliques et emplir les voûtes romanes dont elle semblait l’émanation et la voix même.

Combien de fois des Esseintes n’avait-il pas été saisi et courbé par un irrésistible souffle, alors que le « Christus factus est » du chant grégorien s’élevait dans la nef dont les piliers tremblaient parmi les mobiles nuées des encensoirs, ou que le faux-bourdon du « De profundis » gémissait, lugubre de même qu’un sanglot contenu, poignant ainsi qu’un appel désespéré de l’humanité pleurant sa destinée mortelle, implorant la miséricorde attendrie de son Sauveur !

En comparaison de ce chant magnifique, créé par le génie de l’Église, impersonnel, anonyme comme l’orgue même dont l’inventeur est inconnu, toute musique religieuse lui paraissait profane. Au fond, dans toutes les œuvres de Jomelli et de Porpora, de Carissimi et de Durante, dans les conceptions les plus admirables de Hændel et de Bach, il n’y avait pas la renonciation d’un succès public, le sacrifice d’un effet d’art, l’abdication d’un orgueil humain s’écoutant prier ; tout au plus, avec les imposantes messes de Lesueur célébrées à Saint-Roch, le style religieux s’affirmait-il, grave et auguste, se rapprochant au point de vue de l’âpre nudité, de l’austère majesté du vieux plain-chant.

Depuis lors, absolument révolté par ces prétextes à Stabat, imaginés par les Pergolèse et les Rossini, par